La co-création de startup consiste pour un groupe à s’associer avec une entreprise externe pour créer la (ou les) startup(s) qui sera dédiée à l’atteinte d’un objectif business défini par le groupe : nouvelles opportunités de croissance ou nouveaux usages, souvent induits par la révolution digitale…
Dans ce but, l’entreprise collabore avec un prestataire externe : startup studio corporate ou cabinet de conseil. Ensemble, ils mettent à plat les besoins en terme d’innovation dans le but de trouver des leviers performants pour atteindre ces objectifs. Concrètement, le groupe et le studio créent ensemble une ou plusieurs startups.
Ce faisant, le startup studio corporate, spécialiste de l’écosystème des startups, intervient dès le début du processus. Gilles Debuchy illustre : “Nous intervenons très rapidement avec l’entreprise, nous cherchons à comprendre en profondeur les « pain-points » et opportunités qui se présentent à elles (et à ses propres clients), puis nous cherchons à designer la ou les bonnes solutions pour y répondre. C’est notre phase d’idéation. Ces solutions sont bêta testées par nos équipes, la ou les startups que nous jugeons pérennes sont créées, un co-entrepreneur est recruté. La startup est lancée, le processus est extrêmement agile et rapide. ”
Conscients de la nécessité de développer des véhicules d’innovation de rupture, les groupes sont souvent mal à l’aise ou freinés dans le déploiement en interne d’innovation radicale. Ils ont donc recours à de nouveaux processus pour accéder à ce modèle d’innovation (incubation, capital risque corporate, accélération, intrapreneuriat). Mais aujourd’hui, pour un groupe, le modèle de co-création semble plus vertueux à bien des égards. Le risque financier est amoindri, et surtout, la startup co-créée est “by design” alignée avec les objectifs stratégiques du groupe. A la fin du processus, l’entreprise est en position privilégiée pour l’intégrer (spin in).
Comme dans le cadre traditionnel d’une accélération, la co-création avec un startup studio corporate va apporter à une startup (alignée avec les besoins d’innovation d’un groupe) l’espace-temps pour croître et mûrir, ainsi que les ressources nécessaires à l’accélération de son développement. Ce que Ben Yoskovitz, cofondateur d’Highline BETA résume de la manière suivante : “co-créer avec des startup studios corporate permet, par l’externalisation, de libérer la bride fréquemment imposée aux innovations de rupture dans les grandes organisations”.
La co-création permet donc de limiter l’impact de l’inertie propre à ces grands groupes sur la startup naissante. “Même lorsque l’on parle de développements “ultra rapides” dans une grande entreprise, l’échelle de temps se mesure en trimestres” souligne Gilles Debuchy, fondateur de WeFound. Quand pour une startup l’espace temps se mesure en semaines et parfois même en jours. Dans un environnement macro-économique marqué par la transition digitale (que beaucoup de patrons de grands groupes observent avec une certaine appréhension), la capacité de déploiement réelle fera souvent la différence. En d’autres termes, entre celui qui deviendra un leader et celui qui restera sur le bord de la route, tout peut se jouer autour de son Time to Market, de sa capacité de mise en action.
Tel Saturne dévorant ses enfants. Le groupe multinational peut s’avérer être un redoutable prédateur, c’est d’ailleurs sa force. Les grands groupes français sont en effet des machines de guerre. A l’aise dans la compétition internationale, leurs dirigeants sont de redoutables chasseurs habitués à absorber leurs concurrents à l’instar des champions français de la croissance externe que sont LVMH, AXA ou Bolloré. Mais, fortement normatives, et surtout sereines dans des systèmes régulés, les grandes entreprises françaises sont par ADN peu adaptées à l’innovation radicale comme peuvent l’être Amazon ou Apple.
En ce sens avoir la tentation de faire grandir une startup en son sein, c’est comme demander à une lionne d’élever une gazelle. Certes, cela peut exister, mais mieux vaut que la lionne soit bien dressée, voire apprivoisée. Mais dans ce cas, le risque c’est que la lionne perdre en compétitivité dans son milieu naturel… Et c’est bien en ce sens que l’apport du startup studio corporate peut être essentiel si les groupes veulent intégrer l’innovation de rupture sans se dénaturer.